Nouvelle loi en Bolivie

Préoccupation de l’OIT concernant la nouvelle loi en Bolivie sur le travail des enfants

Le nouveau Code de l’enfance et de l’adolescence, Loi no. 548 du 17 juillet 2014, publié dans la Gazette Officielle du gouvernement de Bolivie le 23 juillet 2014, réglemente le «Droit à la protection de l’enfant et de l’adolescent au travail» (Chapitre VI).

Déclaration | 28 juillet 2014
Le gouvernement de la Bolivie a ratifié la Convention no. 138 de l’OIT sur l’âge minimum d’admission à l’emploi et la Convention no. 182 sur les pires formes de travail des enfants. La Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (CEACR) de l’OIT, le seul organe ayant l’autorité de se prononcer à ce sujet, va examiner la conformité du nouveau Code avec les Conventions mentionnées ci-dessus durant sa session de novembre-décembre 2014. Sans préjudice des commentaires qui pourraient être formulés par la CEACR et dans l’attente de son examen, l’OIT soulève les préoccupations suivantes concernant certains aspects du nouveau Code.

Le nouveau Code fixe l’âge minimum d’admission à l’emploi à 14 ans, comme déclaré par la Bolivie en 1997 lorsque le pays a ratifié la Convention no. 138 sur l’âge minimum. Cependant, le nouveau Code élargit la possibilité de réduire cet âge minimum dans certains cas.

Premièrement, le nouveau Code permet aux enfants et adolescents de 10 à 14 ans de travailler pour leur propre compte. Il faut préciser, à cet égard, que la Convention no. 138 ne permet pas le travail ou l’emploi d’un enfant (y compris pour son propre compte) s’il n’a pas atteint l’âge déclaré internationalement lors de la ratification de la Convention, soit 14 ans dans le cas de la Bolivie.

Deuxièmement, il permet aux enfants ou adolescents de 12 à 14 ans de travailler pour un tiers. Il faut préciser, à cet égard, que la Convention no. 138 permet le travail à partir de 12 ans uniquement pour des travaux légers qui ne menacent pas la santé et la sécurité de l’enfant, et qui n’entravent pas leur éducation ou leur orientation et formation professionnelles.

Par ailleurs, l’OIT exprime sa préoccupation du fait que le nouveau Code n’offre pas de protection adéquate aux enfants engagés dans des travaux dangereux dans le cadre familial ou communautaire, où les enfants travaillent dans la pêche de fleuves et de lacs, dans l’agriculture, dans l’élevage de bétail ou dans la maçonnerie. La loi elle-même énumère toutes les activités dangereuses qui sont interdites, tout en prévoyant une exception lorsque ces activités se déroulent dans le cadre familial ou communautaire. Les enfants engagés dans de telles activités dans le cadre familial ou communautaire pourraient effectuer du travail dangereux, qui de plus pourrait nuire à leur éducation. Selon la Convention no. 138 et la Convention no. 182, les enfants exerçant ce type d’activités devraient être protégés au même titre que les enfants qui pourraient les exercer en dehors du cadre familial ou communautaire.

Il est important de noter que les Conventions no. 138 et no. 182 interdisent que les enfants ou adolescents de moins de 18 ans exercent une activité dangereuse. Aucune exception n’est possible en ce qui concerne l’âge minimum pour les travaux dangereux que le travail se déroule dans le cadre d’une relation de travail ou dans le cadre familial ou communautaire.

Par ailleurs, l’OIT note que certaines déclarations publique concomittantes à l’adoption du nouveau code laissaient entendre que le travail des enfants est une réalité inévitable. De nombreuses études et analyses ont demontré le cycle intergénérationnel de la pauvreté et du travail des enfants. Le travail des enfants constitue un obstacle à l’accès à l’éducation et à l’acquisition de compétences dont les enfants ont besoin pour accéder à un travail décent en tant qu’adulte, ce qui leur permettraient, à terme,  d’envoyer leurs propres enfants à l’école. Le travail des enfants ne peut pas être justifié comme un «mal nécessaire» et un moyen de développement. Les gouvernements ont l’obligation de protéger les enfants et adolescents du travail des enfants, entre autres, par l’établissement de socles de protection sociale qui préservent leurs familles contre la pauvreté.

Le nouveau Code va à l’encontre de la tendance mondiale, qui est d’augmenter progressivement l’âge minimum d’admission à l’emploi, pour l’aligner avec l’âge de fin d’une éducation obligatoire. De nombreux pays, y compris certains d’Amérique latine, ont adopté ces dernières années de nouvelles lois à cet effet.

D’après les dernières statistiques disponibles, 746 000 enfants étaient en situation de travail des enfants en Bolivie en 2008. L’OIT se félicite qu’au cours des dernières années, les services publics d’éducation, de santé, de l’emploi et de la protection sociale se soient renforcés en Bolivie. Elle se réjouit également de l’augmentation de l’âge de scolarisation obligatoire à 17 ans (Loi d’éducation no. 70 “Avelino Siñani – Elizardo Pérez” de 2010). Toutes ces mesures mettent clairement en évidence l’intention et la volonté des autorités boliviennes de promouvoir un développement humain et économique digne pour tous les citoyens.

L’OIT reconnaît les efforts de la Bolivie pour mettre à jour ses lois afin de protéger et garantir l’ensemble des droits des enfants et adolescents boliviens par le biais du nouveau Code de l’enfance et de l’adolescence.

L’OIT continuera de soutenir les efforts des autorités boliviennes, des organisations de travailleurs et d’employeurs et de la société civile dans son ensemble, qui visent à éliminer le travail des enfants et à promouvoir le travail décent pour les adultes.