Chapitre 8. Salaire minimum des travailleurs domestiques

8.4 Salaire minimum pour les travailleurs domestiques: qui décide?

Les organisations de travailleurs domestiques et leurs employeurs devraient participer au processus de fixation du salaire minimum

La convention (n° 131) sur la fixation des salaires minima, 1970 précise que des dispositions doivent être prises pour permettre la participation directe (sur un pied d'égalité) de diverses parties prenantes au processus de fixation du salaire minimum: les organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées ou, en l'absence de ces organisations, des représentants des employeurs et des travailleurs concernés, ainsi que des personnes ayant une compétence reconnue pour représenter les intérêts généraux du pays (voir Chapitre 3).

La situation n’est pas différente pour les travailleurs domestiques.
Lorsque les pouvoirs publics établissent un salaire minimum pour ce secteur, les organisations de travailleurs domestiques et d’employeurs ‒ lorsqu’elles existent ‒ devraient y participer, parce qu’elles sont les plus au fait des problèmes de rémunération qui s’y posent.

Prenant acte du faible niveau d'organisation dans ce secteur, l’article 18 de la convention (n° 189) sur les travailleurs domestiques, 2011 dispose que:
« ... Tout Membre doit mettre en œuvre les dispositions de la présente convention, en consultation avec les organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives par voie de législation ainsi que par des conventions collectives ou des mesures supplémentaires conformes à la pratique nationale, en étendant ou en adaptant les mesures existantes aux travailleurs domestiques, ou en élaborant des mesures spécifiques à leur endroit, s'il y a lieu.».

Les travailleurs et leurs employeurs ont le droit fondamental de faire entendre leur voix et d’être représentés. Cependant, les travailleurs domestiques ne sont pas toujours regroupés en organisations représentatives, et leurs employeurs encore moins.

Il existe des organisations de travailleurs domestiques et d’employeurs dans certains pays; ailleurs, ces travailleurs sont parfois représentés par les organisations les plus représentatives. Dans d'autres cas, ces organisations n’existent pas, ou ne sont pas affiliées à des instances représentatives.

Dans certains pays, les travailleurs domestiques ne sont pas organisés en syndicats. Cela est parfois dû au fait qu'ils n’ont pas le droit de constituer des syndicats, ou que des obstacles pratiques en entravent la formation.

Dans plusieurs pays, le salaire minimum des travailleurs domestiques est fixé par voie de négociation collective, au moyen de consultations tripartites, ou par un groupe tripartite d'experts, en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, ou avec les organisations les plus représentatives d’employeurs et de travailleurs, voire les deux.

Cas particuliers

Présence d’organisations représentatives
Lorsqu’il existe des organisations représentatives de travailleurs domestiques et d’employeurs, le salaire minimum devrait être fixé en consultation avec elles, ou négocié collectivement.

En France, le SMIC s’applique à tous les travailleurs, y compris les travailleurs domestiques. De plus, trois conventions collectives ont été négociées entre les syndicats et les organisations représentant les employeurs de travailleurs domestiques. Toutes ces conventions tiennent compte des divers types de relation de travail, selon que le travailleur est placé chez son employeur par un organisme public ou privé, ou est directement embauché par le ménage. Il existe des organisations d'employeurs pour chaque type de relation de travail, et chacune est signataire de la convention collective concernée.

Présence d'autres organisations d’employeurs
Fréquemment, il existe un syndicat de travailleurs domestiques, mais pas d'organisation patronale. En Uruguay, le Syndicat des travailleurs domestiques (SUTD) a demandé l’instauration d'un salaire minimum pour les travailleurs domestiques, mais il fallait au préalable identifier une organisation d'employeurs comme partenaire aux négociations.
Le gouvernement a approché la Chambre de commerce ‒ qui a décliné l’offre ‒ puis la Ligue des femmes au foyer (Liga de Amas de Casa, Consumidores y Usuarios de la Republica de Uruguay, LACCU), afin d’agir comme organisation représentative des employeurs. La LACCU a accepté et signé un accord prévoyant, entre autres, un salaire minimum pour les travailleurs domestiques.

En Argentine, sept syndicats de travailleurs domestiques et deux organisations d’employeurs sont convenues d’une augmentation du salaire minimum1.

Travailleurs domestiques et employeurs insuffisamment organisés
En règle générale, le salaire minimum des travailleurs domestiques est fixé à un niveau donné en raison de leur vulnérabilité et de la faiblesse des organisations représentatives dans ce secteur. D’autres représentants doivent donc parfois intervenir.

En Suisse, à l’initiative de la Confédération nationale des syndicats (UNIA), les organisations sectorielles représentatives les plus concernées par le travail domestique, soit le syndicat de l'hôtellerie et des services et son homologue patronal de l’hôtellerie et de la restauration, ont négocié un salaire minimum pour les travailleurs domestiques, dans le cadre d'un contrat de travail type.

En Afrique du Sud, le salaire minimum a été fixé au niveau sectoriel, en consultation avec un comité tripartite d'experts, pour les secteurs d’activité où n’existent pas d’instances de représentation. En 2002, le ministère du Travail a adopté le premier salaire minimum pour les travailleurs domestiques, en consultation avec un groupe tripartite d’experts, le Syndicat des travailleurs domestiques (SADSAWU), les travailleurs, les employeurs et le public.

1 C. Hobden: «Labour Relations and Collective Bargaining, Issue Brief n° 2: Improving working conditions for domestic workers: organizing, coordinated action and bargaining», BIT, Genève, 2015.