L’essor attendu de l’emploi dans l’industrie du tourisme

L’industrie du voyage et du tourisme est l’un des secteurs les plus vastes et les plus dynamiques de l’économie mondiale actuelle. Elle devrait générer environ 9 pour cent du PIB total et représenter plus de 235 millions d’emplois en 2010, soit 8 pour cent de l’emploi mondial. En novembre dernier, plus de 150 délégués gouvernementaux, employeurs et travailleurs venus d’une cinquantaine de pays, réunis pour le Forum de dialogue mondial de l’OIT sur les nouveaux développements et défis dans le secteur de l’hôtellerie et du tourisme, ont discuté de l’évolution du secteur et de ses enjeux. Le Forum a été inauguré par M. Taleb Rifai, Secrétaire général de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) et M. Juan Somavia, Directeur général du BIT.

Par rapport aux autres secteurs de l’économie mondiale, cette industrie est l’une de celles qui se développe le plus vite, représentant plus du tiers du commerce mondial des services. Le Forum de l’OIT a abordé la forte intensité de main-d’œuvre du secteur, qui fait de lui une source primordiale d’emploi. Figurant parmi les tout premiers pourvoyeurs d’emplois à l’échelle mondiale, le tourisme requiert divers degrés de qualification et permet un accès rapide au marché du travail pour les jeunes, les femmes et les travailleurs migrants.

Selon un rapport du BIT1 préparé pour le Forum, le tourisme mondial a été affecté par la crise économique et sociale mondiale, mais il devrait connaître une croissance soutenue au cours de la prochaine décennie. L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) prévoit que l’activité mondiale du secteur fournira 296 millions d’emplois d’ici à 2019.

Le secteur du tourisme a souffert d’un déclin qui a débuté au second semestre 2008 et qui s’est aggravé en 2009, après plusieurs années consécutives de croissance. Une brutale réduction des flux de touristes, de la durée des séjours et des dépenses touristiques, ainsi que de fortes restrictions du budget des voyages d’affaires, ont provoqué une contraction considérable de l’activité économique du secteur à l’échelle mondiale.

Entre autres conséquences de la crise, le nombre de touristes internationaux a reculé de 4 pour cent en 2009 et les recettes du tourisme international ont diminué de 6 pour cent fin 2009. Les régions les plus affectées par cette baisse du tourisme international ont été le Moyen-Orient (-4,9 pour cent), l’Europe (-5,7 pour cent) et les Amériques (-4,6 pour cent). Seule l’Afrique a affiché une croissance constante (+2,9 pour cent), mais sur un volume d’affaires relativement bas.

En dépit de la crise, l’emploi mondial dans l’industrie du tourisme a augmenté d’environ 1 pour cent entre 2008 et 2009, selon le rapport. Mais d’importantes disparités régionales ont été notées eu égard à l’impact de la crise sur l’emploi dans l’hôtellerie-restauration. Si les Amériques ont souffert d’une baisse de 1,7 pour cent de l’emploi, la région Asie-Pacifique a bien résisté, gagnant 4,6 pour cent.

La nécessité du dialogue social

Au cours de la seconde journée du Forum, un débat a été consacré aux nouvelles idées concernant l’importance du dialogue social dans le secteur et aux formules de tourisme durable qui ont un fort potentiel de réduction de la pauvreté. Le panel a abordé les bonnes pratiques qui peuvent être partagées avec d’autres pays en développement, en particulier dans le cadre de la coopération au développement Sud-Sud.

Il a été remarqué que l’environnement de travail contraignant de l’industrie touristique ajoute encore à la valeur du dialogue social sur le lieu de travail et, quand ils sont formalisés, ces processus rendent réellement possible une collaboration constructive au sein des grandes sociétés du secteur de l’hôtellerie et du tourisme.

Parallèlement, les participants ont souligné que, compte tenu du rôle central des petites et moyennes entreprises (PME) dans le secteur, il est difficile de faire une application universelle et systématisée du dialogue social.

«Il devient donc nécessaire de concevoir le dialogue social sous des formes nouvelles et novatrices correspondant à la réalité des petites entreprises du secteur. Cela peut prendre la forme d’une consultation régulière entre les propriétaires/gestionnaires et les représentants du personnel, ou d’enquêtes sur la satisfaction et l’état d’esprit des employés afin de faire ressortir leurs préoccupations», explique Wolfgang Weinz, Spécialiste du secteur de l’hôtellerie, de la restauration et du tourisme au sein du Département des activités sectorielles du BIT.

Besoins de formation et de qualifications

Le Forum s’est tout particulièrement intéressé à l’enseignement et à la formation professionnelle comme conditions préalables à l’efficacité opérationnelle du secteur. Les travailleurs ont souvent des qualifications professionnelles limitées et l’amélioration de leur niveau de formation et d’éducation, y compris sur les questions liées à la santé, est apparue comme un besoin criant.

Selon Wolfgang Weinz, «la place grandissante de la technologie et les exigences plus élevées des consommateurs, tout comme les problèmes d’environnement, requièrent l’instauration d’une relation client/employé plus efficace. La compétitivité et la productivité du secteur dépendent du niveau de qualification, du professionnalisme, de la motivation, de la passion, de la loyauté et des compétences douces des travailleurs.»

Les participants reconnaissent que les travailleurs motivés sont les plus talentueux – désireux de rester au sein de leur société. Certaines des compétences douces requises, notamment les compétences linguistiques et le sens de la communication, la courtoisie, la discipline, la conscience professionnelle, la confiance en soi, la capacité d’adaptation, la créativité et la ponctualité, peuvent être renforcées grâce à la formation. Des lacunes ont également été détectées dans les capacités de gestion des équipes de direction du secteur.

«Aujourd’hui, nous avons une pénurie d’employés qualifiés. Les hôtels doivent former leur personnel. C’est la seule manière d’améliorer la qualité», explique Ghassan Aidi, Président de l’Association internationale de l’hôtellerie et de la restauration (IHRA).

Le rôle des gouvernements

Le rôle des gouvernements a été identifié comme indispensable au développement de l’industrie touristique. Pour devenir une destination attrayante pour les touristes, un site doit offrir toute une gamme de services et d’infrastructures et bénéficier d’une promotion commerciale efficace.

Les hôtels-restaurants offrent eux aussi d’énormes possibilités de réduire la pauvreté dans bien des régions du monde. Les partenariats entre les secteurs public et privé devraient être renforcés afin de garantir une coordination plus efficace et des retombées plus substantielles pour les communautés locales.

Selon Neb Samouth, représentant du gouvernement du Cambodge et intervenant lors du panel, «le tourisme communautaire et l’écotourisme ont bénéficié à plus de 30 communautés locales, constituant des sources alternatives de revenus et d’emplois. Les projets locaux contribuent à protéger les ressources naturelles et constituent une bonne plateforme de dialogue social.»

La nécessité d’améliorer les conditions de travail et le rôle vital du dialogue social ont été soulignés par Ron Oswald, Secrétaire général de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA): «En fonction de sa formule et des emplois qu’il crée dans les régions les plus déshéritées du monde, le tourisme peut contribuer à réduire la pauvreté. Les travailleurs du secteur doivent se voir donner les moyens de sortir de la pauvreté grâce à des organisations représentatives et également, comme le préconise l’OIT, grâce à la négociation collective.»

1 BIT: Développements et défis dans le secteur de l’hôtellerie-restauration et du tourisme (Genève, 2010).