Informalité

Le marché de Gamarra à Lima: les avantages de passer à l’économie formelle

Lutter contre l’informalité est un élément clé de l’action menée par les gouvernements pour réduire les inégalités et l’exclusion sociale. C’est particulièrement vrai pour le Pérou, où 73 pour cent du travail dans l’emploi est informel.

Actualité | 9 octobre 2019
Emily Rojas © Gianfranco Fiorini / OIT
LIMA (OIT Infos) – Dans un pays ou 73 pour cent du travail dans l’emploi est informel, et la plupart du temps exercé par des femmes, les sœurs Rojas sont convaincues des bénéfices pour leur entreprise et leurs employés du passage à l’économie formelle.

Leur magasin est au cœur du marché aux vêtements et textiles de Gamarra, qui est tentaculaire : il emploie plus de 80 000 personnes, pour beaucoup dans le secteur informel, sans protection sociale, ni droits au travail, ni conditions de travail décentes ; et les entreprises ont du mal à accéder au financement. Ce marché est l’une des priorités du gouvernement péruvien dans la lutte contre l’informalité.

Les sœurs Emily et Jenny Rojas emploient 11 personnes dans leur boutique de vêtements, où elles vendent leurs propres marques de vêtements pour hommes: Jhon Houston et Gino Giordano. Six d’entre elles sont officiellement déclarées. «Notre objectif est de les régulariser toutes, mais nous n’avons pas encore pu le faire car nous n’avons pas atteint nos objectifs de production», explique Emily Rojas.

«La formalisation est très importante pour nous puisqu’elle permet aux travailleurs de jouir de certains avantages, comme les congés, l’assurance maladie et la retraite, entre autres. Et en tant que société, avoir une existence officielle permet d’accéder à certains avantages comme le financement», ajoute sa sœur Jenny Rojas.

La formalisation est très importante pour nous puisqu’elle permet aux travailleurs de jouir de certains avantages, comme les congés, l’assurance maladie et la retraite, entre autres.»

Jenny Rojas
Les sœurs Rojas ont participé à une formation dispensée par le ministère péruvien du Travail et de la Promotion de l’emploi par l’intermédiaire du centre Formaliza Peru, qui fournit des orientations et des services d’appui aux employeurs et aux entrepreneurs dans le processus de formalisation des travailleurs. Ce programme organise des ateliers et apporte une assistance technique aux dirigeants et aux travailleurs des micro-entreprises, encourageant la formalisation des travailleurs dans des endroits comme le marché de Gamarra.

La formation est basée sur les outils pour le  programme Des entreprises durables, compétitives et responsables (SCORE) de l'OIT. L’objectif de SCORE est d’aider les entreprises à améliorer les conditions de travail et à accroître leur productivité par la mise en place de systèmes de gestion d’entreprises durables basés sur la coopération sur le lieu de travail.

«Avec une meilleure productivité, les micro et les petites entreprises sont mieux à même d’absorber les coûts de la formalisation», déclare Hernán Zeballos, coordinateur du programme SCORE au Pérou.

Pour Philippe Vanhuynegem, directeur du bureau de l’OIT pour les pays andins, la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle est l’un des principaux axes d’action de l’OIT dans la région. «Les stratégies de formalisation exigent un contexte économique et politique favorable et stable. Il est indispensable d’accélérer la mise en place d’une série de politiques de diversification de la production pour réduire les écarts de productivité entre secteurs et entre entreprises de tailles différentes si l’on veut résoudre ce problème», ajoute M. Vanhuynegem.

Selon les données de l’OIT, le taux d’informalité atteint 53 pour cent en Amérique latine et dans les Caraïbes, touchant près de 140 millions de travailleurs. Les conditions de travail sont souvent précaires, tandis que les droits des travailleurs ne sont pas respectés et que la protection sociale fait défaut.

Au Pérou, 73 pour cent de la main-d’œuvre employée l’est dans des conditions informelles, selon les chiffres officiels publiés récemment par l’Institut national de statistique et d’informatique (INEI) du Pérou. La situation touche plus de 12 millions de travailleurs dans ce pays, essentiellement des femmes.

M. Vanhuynegem souligne que lutter contre l’informalité est un élément clé de l’action menée par les gouvernements pour réduire les inégalités et l’exclusion sociale, et contribue directement à la réalisation de l’objectif 8 sur le travail décent et la croissance économique du programme de développement durable des Nations Unies pour 2030.