NOUVELLES DIRECTIVES POUR PROTEGER LES BÛCHERONS

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - L'Organisation internationale du Travail cherche à améliorer la sécurité, la productivité et le respect de l'environnement dans les travaux forestiers, activité qui concerne trois millions de personnes dans le monde et qui est considérée comme l'une des plus dangereuses qui soit.

Communiqué de presse | 23 septembre 1997

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - L'Organisation internationale du Travail cherche à améliorer la sécurité, la productivité et le respect de l'environnement dans les travaux forestiers, activité qui concerne trois millions de personnes dans le monde et qui est considérée comme l'une des plus dangereuses qui soit.

Dans ce but, elle réunit du 23 au 30 septembre, à Genève, 30 experts représentant les 10 grands pays forestiers que sont l'Afrique du Sud, le Brésil, le Canada, le Chili, les Etats-Unis, le Gabon, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, la République tchèque et la Suède, pour examiner un nouveau Recueil de directives pratiques sur la sécurité et la santé dans les travaux forestiers.

Ces nouvelles directives visent essentiellement à aider les gouvernements, les employeurs et les travailleurs à garantir la santé et la sécurité des travailleurs tout en préservant l'environnement et la productivité de l'industrie forestière.

"Le Recueil de directives pratiques devrait permettre d'améliorer les conditions de travail et d'augmenter la productivité dans le secteur forestier", déclare Kari Tapiola, Directeur général adjoint du BIT. "La sécurité et la formation doivent faire partie intégrante du règlement et de la gestion des entreprises. En outre, il est naturel d'associer la sécurité et la santé avec la protection de l'environnement. Nous espérons que ce nouveau Recueil offrira le moyen d'y parvenir."

Les dangers des travaux forestiers

Chaque année, des milliers de travailleurs forestiers sont tués ou blessés pour cause de protection insuffisante et en raison des dangers liés à l'abattage des arbres. Qui plus est, lorsqu'ils sont réalisés dans des conditions périlleuses, les travaux forestiers portent atteinte à l'environnement, causant plus de dommages que nécessaire à la forêt.

Dans presque tous les pays du monde, les travaux forestiers sont classés, au même titre que les industries extractives et le bâtiment, parmi les branches d'activité les plus dangereuses. La fréquence des accidents et le taux de mortalité y sont 2 à 3 fois plus élevés que dans d'autres secteurs. Aux Etats-Unis, par exemple, on a calculé que durant une carrière de 25 ans, un bûcheron sur 20 risquait de se tuer.

Alors que les médias et l'opinion publique ne s'attardent généralement pas sur les dangers des travaux forestiers, ils critiquent souvent l'industrie forestière pour les dégâts qu'elle cause à l'environnement. Toutefois, les écologistes, les gouvernements et les entrepreneurs sont de plus en plus nombreux à comprendre que la préservation des forêts va de pair avec la protection des travailleurs.

En effet, abattre les arbres et évacuer les troncs sans précaution, par exemple, non seulement cause des dégâts importants et inutiles mais encore multiplie les risques pour les travailleurs. En revanche, surveiller convenablement la direction de la chute épargne les jeunes pousses et limite les dommages causés aux sols et aux cours d'eau tout en protégeant les travailleurs. C'est pourquoi, autant pour préserver les forêts que pour protéger les travailleurs, il faut une main-d'oeuvre qualifiée et stable. Une fois cette idée admise, il faut des méthodes qui permettent de la mettre en pratique.

Même entre des mains expérimentées, la tronçonneuse est l'un des outils potentiellement les plus dangereux jamais inventés. Coupures et plaies ouvertes sont les blessures les plus courantes mais l'utilisation de cet instrument peut également provoquer la surdité et d'autres lésions dues aux vibrations. Lorsqu'elle fonctionne à pleine puissance, la tronçonneuse produit un niveau de bruit qui, en 15 minutes seulement, cause des dommages irréversibles à des oreilles non protégées. Les experts estiment qu'elle demeurera probablement le plus grand danger de la forêt. Déjà utilisée dans tous les pays développés, elle devrait l'être de plus en plus dans les pays en développement où le bois est de plus en plus récolté dans des plantations.

Outre les troubles de l'ouïe et les vibrations, la fatigue physique qu'entraînent l'exécution de lourds travaux et l'exposition à des conditions climatiques extrêmes oblige souvent les travailleurs forestiers à prendre leur retraite prématurément ou à changer de métier.

Le nouveau Recueil de directives pratiques

Ce Recueil se fonde sur les données d'expérience réunies ces dernières années dans le monde entier, desquelles il ressort que toute solution d'ordre exclusivement technique, dans le domaine de la conception des machines par exemple, ou uniquement axée sur le lieu de travail, est vouée à l'échec. Les forêts ne sont pas des usines jouissant d'un cadre de travail stable et appliquant des méthodes régies par des normes bien établies. Rendre plus sûr un environnement aussi difficile suppose la coopération de tous les acteurs. Le projet de Recueil définit un cadre juridique et institutionnel dans lequel les gouvernements, les employeurs, les travailleurs, les propriétaires forestiers, les services d'inspection du travail, les fabricants de machines, etc., ont un rôle précis à assumer. C'est pourquoi un système de formation qui s'adresse à toutes les catégories de travailleurs et qui garantisse à chacune d'elles le niveau de compétence requis constitue un élément essentiel.

Le nouveau Recueil s'adresse à toutes les catégories de travailleurs forestiers, y compris celles chez qui la fréquence des accidents est supérieure à la moyenne, comme les entrepreneurs, les travailleurs indépendants et les chefs d'exploitation; souligne que les principes de la sécurité doivent être appliqués au niveau national, mais surtout dans l'entreprise et sur les chantiers; présente un système de gestion de la sécurité intégrant le souci de la sécurité dans la politique globale de l'entreprise; prévoit un système de formation aboutissant à la délivrance de certificats d'aptitude obligatoires; et contient, à l'intention des pays et des entreprises qui n'ont pas de réglementation précise en matière d'exploitation forestière, des directives techniques détaillées sur la récolte et d'autres opérations à haut risque telles que les travaux dans les arbres, le dégagement des chablis et la lutte contre le feu.

Le rôle de l'entreprise

La sécurité dépend au premier chef de l'entreprise, de sa politique de gestion et de la coopération des travailleurs. La stratégie préconisée dans le Recueil consiste à considérer la sécurité comme une tâche de gestion revêtant la même importance que les autres objectifs de l'entreprise. Cette tâche ne devrait pas être confiée à une structure distincte établissant des règles qui lui soient propres, mais faire partie intégrante de l'organisation générale et des activités de l'entreprise.

Un système de gestion de la sécurité, une main-d'oeuvre compétente ainsi qu'une organisation et une planification professionnelles des travaux sont les conditions préalables pour que les mesures d'ordre technique aient un impact et qu'une culture de la sécurité puisse s'instaurer.

Après l'adoption du Recueil par le Conseil d'administration du BIT, une campagne sera lancée pour le faire connaître et en promouvoir la mise en application. La sécurité n'est pas seulement une nécessité d'ordre moral. En effet, dans les pays où les cotisations d'assurance accident sont très chères, les pertes directes et indirectes occasionnées par les accidents dépassent largement le coût des programmes de prévention. D'ailleurs, les statistiques démontrent que la sécurité est une "option qui rapporte".