Les dirigeants du monde lancent un appel en faveur d'une mondialisation juste pour atteindre les Objectifs du développement du Millénaire

Le Secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, notant que trop de gens - en particulier dans les pays en développement - se sentent exclus et menacés par la mondialisation, a lancé un pressant appel aux dirigeants du monde entier, lundi à New York, afin qu'ils aient la volonté politique nécessaire pour mieux gérer les effets économiques et sociaux de la mondialisation.

Communiqué de presse | 20 septembre 2004

NEW YORK (Nouvelles du BIT) - Le Secrétaire général des Nations unies Kofi Annan, notant que trop de gens - en particulier dans les pays en développement - se sentent exclus et menacés par la mondialisation, a lancé un pressant appel aux dirigeants du monde entier, lundi à New York, afin qu'ils aient la volonté politique nécessaire pour mieux gérer les effets économiques et sociaux de la mondialisation.

Kofi Annan et plus d'une douzaine de Chefs d'Etat ont accueilli favorablement le rapport de la Commission Mondiale sur la Dimension Sociale de la Mondialisation qui demande un système multilatéral plus efficace afin de créer un cadre plus légitime et plus cohérent à la mondialisation.

Les dirigeants ont pris la parole au Siège des Nations unies lors d'un événement spécial intitulé "Une juste mondialisation: mettre en œuvre la Déclaration du Millénaire" - présidé par les deux co-présidents de la Commission Mondiale sur la Dimension Sociale de la Mondialisation, la Présidente de Finlande Mme Tarja Halonen et le Président de Tanzanie M. Benjamin William Mkapa, en présence du Directeur général du BIT Juan Somavia, modérateur.

Kofi Annan a rappelé que dans la déclaration du Millénaire, les dirigeants du monde se sont engagés à faire en sorte que la mondialisation soit une force positive pour tous les peuples du monde entier. "Je n'ai pas de doute, a-t-il dit, que lors de la revue de la déclaration du Millénaire l'année prochaine, il sera clair qu'il reste un long chemin à parcourir pour atteindre ces objectifs".

Le Secrétaire général des Nations unies a encore déclaré que le rapport de la Commission a souligné que "les bénéfices de la mondialisation ont été distribué inégalement avec un fardeau plus important du côté de ceux qui peuvent se protéger le moins."

"Trop de gens en particulier dans les pays en développement se sont sentis exclus et menacés par la mondialisation", a-t-il dit. "Ils ont l'impression d'être les esclaves du marché, alors que cela devrait en être autrement".

Kofi Annan a ajouté: "Nous ne devrions pas oublier que, dans un certain nombre de secteurs - y compris le commerce, le financement du développement et l'allègement de la dette - des promesses solennelles ont été faites. Nous ne devrions pas attendre une réforme institutionnelle avant d'avoir la volonté politique de tenir ces promesses."

"Comme le rapport l'a montré, a-t-il encore dit, la création d'emploi, la protection des droits fondamentaux au travail, le renforcement de la protection sociale et l'élargissement du dialogue social sont des éléments clés pour une mondialisation qui encourage pas seulement la réforme économique mais le progrès social ".

Le Président français, Jacques Chirac a quant à lui déclaré qu'"en Chine, en Inde, au Brésil, dans bien d'autres pays, des centaines de millions de femmes et d'hommes voient leur sort s'améliorer avec la libéralisation de la production et des échanges et l'ouverture aux investissements."

"Mais comment justifier la mondialisation devant les travailleurs dont l'emploi est delocalisé? Où est l'espoir pour les millions de femmes, d'hommes et d'enfants qui consument leur vie dans l'extrême pauvreté ou dans des conditions de travail absolument indignes?"

Jacques Chirac a encore déclaré qu'"il n'y a pas de richesse sans dynamisme et liberté. Souvenons nous aussi que l'égoïsme se paie en révoltes des hommes. Sans attendre qu'il soit trop tard, trouvons les nouveaux équilibres entre le capital et le travail, entre l'intérêt particulier et l'intérêt général, entre la liberté et la règle nécessaire."

Il a donné son soutien total aux recommandations de la Commission mondiale sur la mondialisation présentées aux Nations unies, aux institutions financières et à l'Organisation du commerce faisant référence notamment aux réformes nécessaires de ces organisations et aux objectifs du Millénaire qu'il s'agit d'atteindre.

"Au-delà du système multilatéral, a déclaré le Président français, il nous faut donner un nouveau souffle au dialogue social à l'échelle mondiale, promouvoir une éthique sociale de la mondialisation….Une mondialisation qui tolérerait la prédation et l'accaparement de ses fruits par une minorité n'a pas d'avenir. Une mondialisation qui détruirait les équilibres sociaux et environnementaux, écraserait les plus faibles, nierait les droits de l'homme. Elle n'a pas d'avenir. Il nous appartient de refuser ces dérives. Et, en dotant la mondialisation d'une conscience et d'une éthique sociale, de lui donner sa pleine légitimité et son sens au service de l'homme."

Le Président du Brésil Luiz Inacio da Lula a dit que le rapport de la Commission Mondiale est arrivé au bon moment "combien de fois encore faudra-t-il répéter que l'arme de destruction la plus massive à notre époque est la pauvreté?".

"Nous savons que les forces du marché stimulant la production et l'affectation efficace des ressources" mais les forces du marché seules ne peuvent assurer par elles-mêmes la fin des inégalités et de l'injustice; dans certains cas, elles l'aggravent même. C'est pour cela que l'engagement des dirigeants mondiaux envers le progrès social est nécessaire."

"Nous devons tenir les rênes de la mondialisation et la tourner en une force positive pour tous les peuples du monde", a-t-il ajouté. "Une autre mondialisation - celle qui est à la fois socialement juste et politiquement viable - doit commencer avec le droit à l'emploi, à un travail qui apporte la dignité au travailleur. Accéder à un travail décent est au centre des objectifs prioritaires du Millénaire: la réduction de la pauvreté et de la faim."

Dans son discours, le Président de Tanzanie Benjamin Mkapa a dressé la liste des trois grands axes de travail nécessaires pour prendre la mondialisation en main et atteindre les objectifs du Millénaire.

  • Beaucoup plus doit être accompli par les gouvernements, dans les pays pauvres et riches.
  • L'implication du secteur privé, y compris dans les pays pauvres, doit être dirigé vers une prospérité plus grande, la réduction de la pauvreté et la réalisation des objectifs du Millénaire
  • Le redressement du déficit démocratique de la gouvernance mondiale
"Les déséquilibres constants et persistants dans l'économie actuelle sont éthiquement intolérables, politiquement inacceptables et font le lit de l'insécurité mondiale".

Citant le Président américain John F. Kennedy qui il y a 40 ans déclarait qu'"une société libre qui ne peut aider les pauvres ne peut sauver les quelques uns qui sont riches" et il a ajouté que "dans un monde globalisé, si nous ne pouvons aider la majorité qui est exclue on ne peut sauver la minorité qui est intégrée."

"L'appel pour une mondialisation qui inclut n'est pas de la charité c'est de la justice mais par-dessus tout c'est la survie du riche et du pauvre, la vraie survie de l'esprit de l'humanité."

La présidente de Finlande, Mme Halonen a insisté sur le fait que "par la déclaration du Millénaire, nous relevons le défi de faire en sorte que la mondialisation devienne une force positive, c'est ce qui a guidé la Commission Mondiale sur la Dimension sociale de la Mondialisation".

Elle a déclaré: "Alors que la mondialisation devrait être une force assurant un avenir meilleur pour l'humanité, malheureusement la mondialisation d'aujourd'hui est bien loin de tenir ses promesses et est actuellement fausse et politiquement intenable."

"Une mondialisation n'est pas un jeu à somme nulle, mais un processus qui bénéficie à tous ses participants", a-t-elle dit. "Le fardeau du changement peut être partagé équitablement entre les nations : toute personne a droit de travailler. Le travail décent pour tous doit être un but global. Il doit être poursuivi grâce à des politiques cohérentes au sein du système multilatéral. Parce que les gens continuent à chercher du travail et à envoyer des subsides chez eux, nous avons besoin d'un cadre multilatéral pour les mouvements transfrontaliers."

Le Ministre des Affaires étrangères du Gabon, actuellement Président de l'Assemblée Générale des Nations unies, M. Jean Ping a prédit que l'Assemblée générale tiendrait une place centrale où se forgerait un consensus universel en faveur d'une mondialisation plus équitable et la réalisation d'un idéal de paix, de progrès et de justice."

"C'est donc avec un intérêt tout particulier que l'Assemblée générale examinera le rapport de la Commission mondiale sur la dimension sociale dont la vision novatrice s'inscrit en droite ligne des préoccupations et des aspirations de la majorité des peuples du monde", a conclu le Président Ping.