Migration interne

L’OIT et la Chine lancent la première campagne de prévention du VIH/sida qui met en scène des travailleurs migrants ruraux

Les deux cents millions de migrants internes qui travaillent en Chine jouent un rôle vital dans les secteurs des mines, de la construction et des transports du pays. Mais le manque de sensibilisation au VIH les expose au danger de contracter la maladie. En novembre dernier, l’OIT et le Bureau de la Commission Sida du Conseil d’Etat chinois ont lancé conjointement la première campagne de prévention du VIH/sida auprès des travailleurs migrants ruraux. Reportage de BIT en ligne depuis Beijing.

Article | 17 décembre 2008

BEIJING, China (BIT en ligne) – Zhang Xiao Hu est peu bavard. Quand on l’interroge sur le temps passé comme migrant dans les grandes villes, Xiao Hu est submergé par des souvenirs de solitude et de peur. Ce n’est pas parce qu’il n’avait pas d’amis. Il en avait de nombreux. Mais le poids d’un secret planait sur sa vie.

«J’avais très peur. Je ne pouvais pas dire à mes collègues travailleurs migrants que j’avais le sida. Ils m’auraient évité. Personne n’aurait voulu travailler, manger ou partager un dortoir avec moi.»

Chaque année en Chine, des milliers de travailleurs migrants quittent leurs villes et villages ruraux à la recherche de meilleures possibilités d’emploi dans des villes plus grandes et plus prospères. Selon les statistiques officielles, quelque 200 millions de travailleurs migrants internes font partie de la main-d’œuvre chinoise. Ils représentent environ 15 pour cent de la population du pays, l’un des plus vastes mouvements de population existant au monde.

«Les travailleurs migrants sont une dimension essentielle de nos efforts de prévention du VIH/sida. Parmi les prochaines étapes cruciales figure l’élargissement de notre stratégie afin de toucher un plus grand nombre de travailleurs migrants grâce à des activités de prévention», déclare Pu Yi, directeur local du Centre chinois de contrôle de la maladie. «Auprès de ce segment de la population, nous devrions continuer à concentrer nos efforts sur les dangers associés à des conduites sexuelles à risque, en mettant particulièrement l’accent sur le rôle crucial des préservatifs dans la prévention du VIH/Sida.»

Se situant à peine à 0,05 pour cent, la prévalence du VIH en Chine demeure basse, selon les statistiques des Nations Unies et du gouvernement. Mais l’épidémie grossit en nombre et se répand géographiquement. Cela a poussé le gouvernement à redoubler d’efforts pour protéger les travailleurs migrants ruraux vis-à-vis de l’infection du VIH et pour éviter le passage du VIH des groupes dits à hauts risques vers la population générale.

Grâce à un financement du ministère du Travail américain, l’OIT a lancé un Programme d’éducation sur le lieu de travail dans trois provinces: Anhui, Guangdong et Yunnan. Le programme fait partie des efforts pour aider les partenaires de l’OIT au ministère des Ressources humaines et de la Sécurité sociale, à la Confédération des entreprises de Chine, et à la Fédération des syndicats de Chine, dans leur poursuite des objectifs de travail décent du pays.

«Le programme nous aide à atteindre les travailleurs, à garantir leur santé et leur sécurité au travail et à protéger leur droit de ne pas être discriminé ou stigmatisé en raison du VIH/sida», indique Mme Constance Thomas, Directrice du Bureau de l’OIT en Chine. «Qui plus est, le programme nous permet de mieux cibler la population active de migrants internes qui est très mobile.»

La Chine a fait des progrès en matière de prévention du VIH au cours des dernières années, mais elle doit en faire davantage. Une enquête de l’OIT (Note 1) montre que l’attitude négative des travailleurs migrants envers la maladie demeure très fréquente. Huit travailleurs sur dix déclarent ne pas vouloir travailler avec une personne séropositive.

Xiao Hu espère changer ce type d’attitude. Il fut le premier travailleur immigré en Chine à révéler son statut sérologique positif. Il a récemment joué le rôle principal dans un spot de prévention aux côtés du célèbre acteur chinois Wang Bao Qiang qui fut un travailleur immigré lui aussi. Le film a été réalisé par le metteur en scène distingué au Festival du Film de Cannes Gu Chang Wei.

Xiao Hu y jouait un rôle qui lui était par trop familier: un employé du bâtiment rejeté par ses collègues de travail et ses amis en raison de son statut au regard du VIH. Le film fait partie de la première campagne de prévention du VIH en Chine mettant en scène des travailleurs migrants.

En dépit de son rôle majeur dans le film, Xiao Hu reste timide face aux caméras. Mais quand il s’agit de s’adresser à d’autres travailleurs migrants sur la prévention du VIH et la discrimination qui vise les travailleurs, Xiao Hu est déterminé à contribuer à la diffusion du message de tolérance et d’acceptation de l’autre sur le lieu de travail.


Note 1 - Pour plus d’informations, merci de contacter le Bureau de l’OIT pour la Chine et la Mongolie par téléphone +8610/653.25.091, télécopie +8610/653.21.420 ou courriel beijing@ilo.org