Coopératives: fortes en temps de crise

Message de M. Guy Ryder, Directeur général de l'OIT, à l’occasion de la Journée internationale des coopératives 2013

Déclaration | Genève | 6 juillet 2013
Guy Ryder, Directeur général de l'OIT
L’OIT est heureuse de se joindre à la communauté internationale pour célébrer cette Journée internationale des coopératives.

L’intitulé du thème retenu cette année «La coopérative, une entreprise qui reste forte en temps de crise» est en soi un message positif et encourageant à l’heure où notre confiance dans les entreprises et dans leur respect des valeurs humaines et des principes éthiques fondamentaux est souvent fortement ébranlée.

Portée et aggravée par la crise financière et économique, la crise qui touche le monde du travail a de multiples répercussions, notamment le chômage, qui affecte durement les jeunes, des injustices et des inégalités sur le marché du travail, et, un peu partout, un déficit de protection sociale alarmant. A quoi s’ajoutent les crises alimentaires, les crises énergétiques, les conséquences du changement climatique, les catastrophes naturelles, autant de phénomènes qui suscitent un sentiment de désarroi, d’impuissance et de profonde injustice.

La célébration de la Journée internationale des coopératives est en revanche une belle occasion de se souvenir que la solidarité est une source de vitalité et de créativité, et que des modes d’organisation et de gestion viables peuvent effectivement être fondés sur les valeurs de la justice et de la solidarité.

Sur tous les continents, les entreprises coopératives sont nées de situations de crise, et se sont révélées aptes à répondre directement aux besoins de leurs membres. Elles restent aujourd’hui tout aussi efficaces lorsqu’elles peuvent concrétiser leurs idéaux.

Une étude publiée récemment par le BIT, intitulée "Résister à la récession: le pouvoir des coopératives financières" (Resilience in a downturn: The power of financial cooperatives). montre que les coopératives financières, que cela soit avant, pendant et après la crise financière qui a secoué le monde en 2007 et 2008, s’en sont beaucoup mieux sorties que les institutions traditionnelles détenues par les investisseurs, et met en évidence la stabilité durable qui les caractérise. Elles sont parvenues, et c’est là un point important, à continuer d’assurer la distribution de crédits aux petites et moyennes entreprises, lesquelles, on le sait, sont les principales créatrices d’emplois.

Les coopératives de travailleurs connaissent aujourd’hui un important essor sous l’impulsion des nouvelles réalités économiques, et il apparaît que leur taux de survie égale, voire dépasse, celui des entreprises conventionnelles. Les coopératives ont également montré qu’elles restaient en tout temps capables de fournir des services sociaux à leurs membres; les coopératives de consommateurs aident quant à elles à lutter contre la vie chère. Elles peuvent s’adapter aux contextes les plus divers et se déployer jusqu’au sein des communautés les plus pauvres.

Ce qui assure leur pérennité aux entreprises coopératives, ce sont les valeurs et les principes qui sous-tendent leur stratégie globale: la proximité entre elles et leurs membres; leurs pratiques, axées sur l’offre de service davantage que sur l’enrichissement personnel des gestionnaires; leur mode de gouvernance démocratique; l’adoption d’une perspective à long terme, qui fait prévaloir la sécurité des membres. Autant de facteurs qui expliquent également la relative longévité des coopératives par rapport aux entreprises classiques.

La recommandation sur la promotion des coopératives adoptée en 2002 par l’OIT repose sur ces mêmes principes; elle prend aujourd’hui tout son sens, qu’il s’agisse de faire face aux conséquences immédiates de la crise, de dessiner le futur visage du monde du travail, ou de mettre au point des modèles d’entreprise aptes à combiner de manière optimale efficience économique et responsabilité sociale et environnementale.

Le développement durable constituant désormais un enjeu mondial prioritaire, les coopératives peuvent et doivent jouer dans ce domaine un rôle décisif, et tenter notamment de mobiliser toute leur créativité pour assurer leur croissance dans des créneaux novateurs, notamment les secteurs du recyclage et des énergies renouvelables, et proposer au citoyen des savoir-faire, des informations, des services financiers, des produits d’un prix raisonnable et à faible impact environnemental. En prenant cette direction, elles contribueront également puissamment à l’instauration d’un mode de développement durable, à faible émission de carbone. Pour le monde du travail, les coopératives disposent de tous les atouts nécessaires pour jouer un rôle de premier plan dans la promotion du travail décent pendant cette période de transition et faire que celle-ci soit marquée par un véritable souci de justice.

Le modèle coopératif offre à tous ceux qui œuvrent à la promotion de l’entreprise durable et du développement durable une voie sûre et bien balisée. L’OIT se félicite d’avoir les institutions du système des Nations Unies et l’Alliance coopérative internationale comme compagnes de route pour un voyage appelé à s’accomplir sous le signe de la coopération.