Travail décent

CSBO : les pays contributeurs achèvent une visite d’études en Côte d’Ivoire

Les 9 pays contributeurs au compte supplémentaire du budget ordinaire (CSBO)de l’Organisation internationale du Travail (OIT) - Allemagne, Belgique, Danemark, France, Italie, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas et Suède ont effectué du 5 au 7 octobre 2022, une visite d’études en Côte d’Ivoire. L’objectif de cette mission était de constater l’impact du CSBO sur les bénéficiaires y compris son utilisation pour répondre aux enjeux émergents en Côte d’Ivoire ainsi que son rôle dans le positionnement de l’OIT au sein de l’Équipe de Pays des Nations Unies.

Article | 23 octobre 2022
Le CSBO a permis de financer plusieurs interventions dont notamment le « projet d’appui à la résilience des travailleurs et des entreprises de l'économie informelle et à la relance post-crise COVID-19 en Côte d’Ivoire ».

Les membres de la mission en photo de famille après leur séance de travail avec la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI)
Pour le Directeur du Bureau pays de l’OIT pour la Côte d’Ivoire, le Benin, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Togo, cette visite a de grands enjeux. « L’OIT est engagée depuis 2015 avec l’adoption de la recommandation 204 sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle à appuyer ses membres dans leurs efforts à formaliser l’économie informelle. En Côte d’Ivoire on a eu des projets très intéressants avec des résultats qui ont été très bons » explique Frédéric Lapeyre ajoutant que « nous avons eu une stratégie nationale pour la formalisation de l’économie informelle».

ACTRAV: Un acteur clé de la mise en oeuvre des activités financées par le CSBO

Dans le cadre du projet CSBO, le Bureau pour les activités des travailleurs de l'OIT(ACTRAV) et les organisations syndicales ont conçu le projet, élaboré les stratégies et assuré la mise en œuvre de l’ensemble du volet d’actions en faveur des travailleurs de l’économie informelle. 

Le point de départ a été la mise en œuvre d’une campagne d’information et de sensibilisation sur l’importance de se mobiliser en vue d’un système de protection sociale solide en tant que voie pour faire face aux défis imposés par les crises. Dans ce cadre, il y a eu une étroite coopération entre les syndicats et les institutions de protection sociale (CNPS, CNAM) dont les résultats se sont soldés par un grand nombre d’enregistrements des travailleurs des marchés à la Couverture Maladie Universelle (CMU) et à la RSTI. 

«Nous voulons partager ces bonnes expériences avec les autres pays et notamment avec les pays bailleurs de fonds en leur disant, regardez, l’approche de l’OIT pour permettre la transition vers l’économie formelle fonctionne ; venez voir l’exemple de la Côte d’Ivoire » souligne M. Lapeyre.

Des activités financées par le CSBO ont permis à dix formateurs, dont cinq femmes du Comité Intersyndical pour la Transition vers l’Économie Formelle (CITEF) d'être formés aux outils Think.Coop, Start.Coop et gestion de coopérative de l’OIT.  Au terme de cette formation, la coopérative moderne du vivrier du marché de Marcory (COMOVIMAR) a été créée dans le but de renforcer la résilience des travailleurs de ce marché face aux impacts négatifs de la Covid 19 et au déficit de travail décent qui caractérise leurs conditions de travail.

Le CSBO : un outil de visibilité de l’agenda du travail décent

Les partenaires au développement se sont rendus au marché de Marcory pour échanger avec les femmes de la COMOVIMAR. Fofana Mariam, vendeuse de bananes plantains et de produits vivriers divers dans ce marché est membre de cette coopérative. Une activité héritée de sa mère qu’elle exerce depuis son jeune âge à côté de cette dernière aujourd’hui à la retraite. Mme Fofana évalue l’importance de la COMOVIMAR qui a boosté ses activités.

Fofana Mariam, membre de la coopérative COMOVIMAR, félicitée par Guy Ryder, ex-DG de l’OIT lors de sa visite en Côte d’Ivoire en septembre 2022
« Mon commerce d’avant et maintenant ce n’est pas la même chose. Maintenant je gagne deux fois, grâce à la COMOVIMAR. Je peux aider mon époux à subvenir aux charges de la maison. Je remercie l’OIT pour son encadrement qui nous permet aussi d’avoir une protection sociale ».
Comme Fofana Mariam, plusieurs dizaines de femmes ont adhéré à la Couverture Maladie Universelle (CMU) et au Régime Social des Travailleurs indépendants (RSTI) grâce à la coopérative COMOVIMAR. C’est le cas de Kouakou N'zi épouse Kouablan, vendeuse de produits vivriers au marché de Marcory. Présidente de la COMOVIMAR, elle ne tarit pas d’éloges les progrès réalisés par l’ensemble de ses membres grâce à leur coopérative qui a changé leur vie.
« L’OIT et la COMOVIMAR ont changé notre vie », se réjouit-elle.

Pour les partenaires au développement, la COMOVIMAR est une alternative crédible pour sortir les femmes de l’économie informelle et de la précarité.
Thérèse Sjöström Jaekel, de la Coopération suédoise pour le Développement est leur porte-parole. Elle juge le travail de la COMOVIMAR encadrée par le Comité Intersyndical pour la Transition vers l’Economie Formelle (CITEF) et ACTRAV.
« Mon pays la Suède, est fier de les accompagner. C'est important pour nous de rencontrer des femmes comme nous l'avons fait aujourd'hui. Elles ont bien utilisé le financement apporté, c'est un honneur. Je veux les féliciter pour cela. Nous voulons continuer ce partenariat bénéfique pour tous. Et je suis sûre que ces femmes qui sont mères, grands-mères, tantes et tous les enfants autour d'elles apprennent non seulement en recevant les bienfaits de ce projet mais aussi en regardant ces femmes autour d'eux, car les choses peuvent changer quand on s'organise et qu'on travaille ensemble. Nous les soutenons »

CSBO : un catalyseur du dialogue social

Partenaire traditionnel de la Confédération Générale des Entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI), l’OIT a financé grâce au CSBO, des besoins spécifiques de la CGECI en termes de formation, notamment sur les outils ‘’Gérez Mieux votre Entreprise’’(GERME) et ‘’Formalisez votre Entreprise’’ (FVE).
Les partenaires au développement sont allés au siège de la CGECI pour s’imprégner des résultats de ce financement.

Nguessan Mikou, chef du service ‘’projet d’appui au secteur privé’’ à la CGECI, s’occupe des outils de formation de l’OIT ( GERME et FVE) au sein de la CGECI. Il explique ces différents programmes et met l’accent sur leur durabilité.
« Avant ‘’GERME’’ l’orientation des candidats dépendait du feeling, du background, de l’expérience de la personne qui recevait l’entrepreneur. ’’GREME’’ nous a donné la structuration, ‘’GERME nous a donné de la méthodologie, une façon de faire. Ce qui se passe aujourd’hui, c’est qu’avec cette méthodologie, nous avons multiplié l’efficacité parce que tous les formateurs ont la capacité de recevoir un entrepreneur, de lui donner les outils, de lui prodiguer des conseils pour savoir comment avoir un marché, comment avoir accès à un financement. Tout cela grâce à la méthodologie » indique M. Mikou soulignant que la durabilité se fait par la synergie avec les formateurs. « Nous ne travaillons pas seuls, nous sommes affiliés au réseau des formateurs ‘’GERME’’. Il en est de même de la collaboration que nous avons avec Côte d’Ivoire PME et avec d’autres structures comme la CNPS. Ce sont ces synergies-là qui vont contribuer à la durabilité » conclut M. Mikou.

Une bénéficiaire des interventions financées par le CSBO présente ses produits aux membres de la mission
Environ une vingtaine d’entrepreneurs de l’économie informelle ont bénéficié de la phase pilote de formation aux outils de l’OIT dont Cissé Mabré, fondatrice de la société Amine-Indus SARL, un exemple de réussite.
Agronome de formation, elle est bénéficiaire du projet GERME, une aubaine pour elle qui a passé des années d'errance pour trouver une orientation. Aujourd’hui elle s'est spécialisée dans la valorisation du miel naturel qu'elle exporte dans les pays de la sous-région.
« Avant ‘’GERME’’, j’étais à l’étape d’idée, j’avais envie d’entreprendre mais je n’avais pas encore l’idée précise à partir de laquelle commencer l’aventure entrepreneuriale. Dans le processus de formation j’ai réussi à sélectionner mes idées et opter pour le miel. Cela m’a permis de sélectionner l’idée par laquelle il fallait commencer l’activité et de faire un chronogramme d’exécution de mon projet. Aujourd’hui, j’ai un restau de distribution au Burkina, Congo, Ghana, Sénégal.

Comme Cissé Mabré, plusieurs autres entrepreneurs ont bénéficié du module novateur de l’OIT dénommé « formalisez votre entreprise ».
C’est le cas de Hermine Kouyaté qui a formalisé son entreprise de valorisation de champignons et de production de jus de fruits grâce au projet CSBO de l’OIT.
« Nous produisons des champignons en hors sol et nous les distribuons sous forme de champignons frais déshydratés en plats cuisinés, en boisson et même il y a des produits cosmétiques à base de champignons. Nous avons intégré le projet GERME de l’OIT en 2021. À la suite de la pandémie à Covid 19, nous étions sur le point d’abandonner notre projet parce que nous avions fait beaucoup de pertes et avec la formation de l’OIT, nous avons restructuré notre entreprise. Nous avons redynamisé notre vision et développé de nouveaux produits qui nous ont permis de rebondir rapidement sur le marché ».
Un des projets qu’appuie le CSBO, est la campagne de sensibilisation à la formalisation des travailleurs domestiques en Côte d’Ivoire. Financée par la Suisse, les partenaires au développement ont suivi le lancement officiel de cette campagne le 7 octobre 2022 par le ministre de l’Emploi et de la Protection Sociale. Ce partenariat a été rendu possible grâce à l’investissement du CSBO, un élément catalyseur et levier du dialogue social.

A cette occasion, Adama Kamara a exhorté les employeurs du personnel de maison à les déclarer afin de leur permettre de conquérir leurs droits.
« Les travailleurs dont il s’agit aujourd’hui, ceux qui sont à l’honneur qu’on appelle les travailleurs domestiques, qu’on appelle les gens de maisons sont des travailleurs qui vivent nos quotidiens, qui font corps avec nous et très souvent en dépit d’existence d’un dispositif législatif et un dispositif de protection sociale qui leurs assurent les droits dont ils n’ont pas accès. Avec le système des nations unies nous avons décidé de faire la promotion de ces instruments existant à leur profit qui sont des instruments de protection sociale protecteurs de leurs droits ».
A ce jour, la Côte d’Ivoire enregistre plus de deux millions de travailleurs domestiques dont 3 mille 683 déclarés à la protection sociale par une population d’employeurs estimée à 2 mille 218.

Que ce soit avec le Coordonnateur Résident du système des Nations Unies en Côte d’Ivoire, avec le Bureau Régional de l’OIT, le Bureau pays de l’OIT/Abidjan, les femmes de l’économie informelle, les partenaires au développement de l’OIT en visite en Côte d'Ivoire ont pu mesurer l’importance du CSBO et les synergies qu’il représente avec les projets en cours au bureau pays de l’OIT / Abidjan.

Le CSBO en un coup d'oeil

Le compte supplémentaire du budget ordinaire (CSBO) est un dispositif de financement essentiel qui permet à l’OIT et à ses partenaires de développement de faire progresser la réalisation de l’Agenda du travail décent et des objectifs de développement durable connexes. Il s’agit d’un élément fondamental de l’ensemble de ressources de l’OIT, qui est alimenté par des contributions volontaires non affectées. Du fait de cette non-affectation, l’Organisation dispose d’une certaine souplesse qui lui permet de saisir les occasions d’obtenir des résultats en intervenant dans des domaines ou des pays où l’accès à d’autres ressources est restreint.

L’OIT utilise les ressources du CSBO pour faire avancer les programmes par pays de promotion du travail décent de diverses façons, y compris pour :
• Lancer des initiatives innovantes
• Répondre rapidement aux besoins émergents
• Élargir la portée ou l’ampleur des programmes existants
• Intégrer des questions transversales dans les politiques et programmes relatifs au travail
• Mobiliser davantage de fonds auprès d’autres sources
• Travailler en partenariat avec d’autres organismes des Nations Unies de façon à rendre plus durables ses activités d’assistance.

Photo de groupe après le lancement de la campagne de sensibilisation à la formalisation des travailleurs domestiques